La gestion du stress : un autre point fort de l’aromathérapie
L’usage des huiles essentielles se prête particulièrement bien à la régulation des retentissements du stress en opérant notamment en olfactologie (ou olfactothérapie).
La voie olfactive assure cette interaction directe avec le système nerveux central recherchée spécialement dans les déséquilibres nerveux.
Pour les soignants qui exercent en hôpitaux, en cliniques ou en EHPAD, les huiles essentielles seront fort utiles en cas de surmenage professionnel.
Du côté des résidents en EHPAD ou en services de gériatrie, les douleurs liées à certaines pathologies chroniques (oncologie) ou de fin de vie en soins palliatifs sont génératrices de stress.
Sans occulter pour autant des facteurs psychologiques tout aussi éprouvants comme l’isolement familial et l’angoisse de la mort.
Anatomie du stress
Ce mécanisme de défense ancestral destiné à assurer notre survie face aux agressions de notre environnement. Tout facteur interprété comme stressant initie l’alarme au niveau des structures limbiques (siège de nos émotions). Tout un programme de réactions physiologiques en cascades est alors enclenché pour permettre à l’organisme de s’adapter.
Lorsque cet état de stress devient chronique, il impacte les dimensions physiques, émotionnelles, intellectuelles de nos équilibres de santé. Il s’exprime cliniquement de façon polymorphe : palpitations cardiaques, maux de tête, douleurs abdominales, insomnie, anxiété, fatigue, déficiences cognitives...
Son déroulement en trois étapes successives est parfaitement décrit :
- phase d’alarme : immédiate et adrénergique (activation du système nerveux sympathique et des médullosurrénales);
- phase de résistance : en phase chronique, cortisolique (activation des corticosurrénales);
- phase d’épuisement : dépassement des capacités d’adaptation, perte du rétrocontrôle corticotrope, immunodépression et effondrement des neurotransmetteurs.
Stratégies aromatiques anti-stress
La voie olfactive constitue un levier d’action anti-stress puissant par son influence directe sur le cerveau limbique. Tout l’enjeu est d’agir le plus précocement avant la phase d’épuisement en mettant en place une prise en charge globale.
L’étendue des pouvoirs des huiles essentielles nous permet d’intervenir à plusieurs niveaux pour notamment :
- Atténuer les influx nerveux excitateurs en stimulant les neurotransmetteurs inhibiteurs (GABA)
- Réduire l’emprise du tonus sympathique excitant (effet sympatholytique) et renforcer l’activité parasympathique relaxante (effet parasympathomimétique)
- Freiner les sécrétions cortisoliques surrénaliennes
Sélection (non exhaustive) d’huiles essentielles majeures et plus spécifiques, à adopter selon les préférences olfactives personnelles(1)
Trois huiles essentielles anti-stress incontournables :
Huile essentielle de lavande officinale Lavandula angustifolia L. (sommité fleurie)
Les vertus médicinales associées à son excellente tolérance placent l’huile essentielle de l’or bleu provençal en tête des choix à privilégier.
De plus, elle bénéficie de l’agrément de l’OMS, de l’EMA (agence européenne du médicament) et de l’ESCOP (Coopérative européenne scientifique de la phytothérapie) pour soulager stress et anxiété.
Elle exhale une senteur florale et aromatique.
Sur le plan phytochimique, les composés de la famille esters terpéniques (acétate de linalyle et de lavandulyle) sont prépondérants, à la fois calmants, sédatifs, antispasmodiques. Elle est également bien pourvue en linalol, l'un des rares alcools terpéniques anxiolytique (agoniste gabaergique). L’extrait exercerait en parallèle une modulation des récepteurs centraux au glutamate, une action sympatholytique et bloquerait la recapture de la sérotonine (action antidépressive)(2) .
Les marqueurs du stress (cortisol salivaire et chromogranine A) et la pression artérielle systolique sont significativement abaissés dans une méta-analyse(3). De même, le niveau de stress des infirmiers en unités de soins intensifs est diminué par une exposition quotidienne à une huile essentielle de lavande officinale pendant 30 jours(4).
L’huile essentielle de petit grain bigaradier : Citrus aurantium amara (feuilles)
On pourra faire appel à elle en alternative à l’huile essentielle de lavande officinale lorsque l’odeur de cette dernière sera boudée, leurs profils de composés moléculaires majoritaires étant assez proches.
C’est l’une des trois huiles essentielles obtenue à partir de l’oranger amer. Elle présente l’avantage d’être dépourvue de risques de photosensibilisation.
Au niveau olfactif elle distille une senteur florale fraîche et acidulée, plutôt verte.
C’est une rééquilibrante nerveuse, sympatholytique, antispasmodique, relaxante et sédative.
L’huile essentielle de litsée citronnée ou verveine exotique : Listea cubeba L.(fruits).
Elle intervient en complémentarité des deux premières. Elle fera merveille également pour désodoriser l’atmosphère de façon magistrale.
Sa fragrance est douce, fraîche et citronnée.
Biochimiquement, elle est principalement dominée par les aldéhydes terpéniques (citrals : géranial, néral) relaxants et responsables de son odeur citronnée mais aussi de son effet irritant cutané. Pour cette raison, en application cutanée elle ne sera jamais utilisée pure mais uniquement diluée à 20% maximum dans une huile végétale. Elle est décrite comme parasympathomimétique, sérotoninergique, frénatrice de l’activité surrénalienne et régulatrice émotionnelle.
Par principe de précaution, on évitera son emploi sur le long terme et à doses élevées chez les personnes sous certains traitements anticancéreux et antidouleurs, compte-tenu de l’effet inhibiteur modéré des citrals sur le cytochrome 2B6(5)
Dans ce cas de figure, et avant toutes utilisations, il sera nécessaire de demander l’avis d’un professionnel de la santé formé en aromathérapie.
D’autres huiles essentielles plus spécifiques
- Choc émotionnel : huile essentielle de camomille noble Chamaemelum nobile L. (fleurs), parasympathomimétique, inhibitrice surrénalienne et apaisante émotionnelle.
- Nervosité extrême : essence de mandarine, Citrus reticulata blanco (péricarpe du fruit), sympatholytique.
- Spasmes digestifs sévères : Huile essentielle de basilic tropical Ocimum basilicum L. (feuilles et fleurs), puissante spasmolytique.
- Palpitations : huile essentielle d’ylang ylang, Cananga odorata Hook. (fleurs), sympatholytique, rééquilibrante émotionnelle.
- Nécessité de lâcher prise : huile essentielle d’encens Boswellia carterii (gomme résine).
- Angoisse : huile essentielle de marjolaine à coquilles Origanum majorana L., (sommités fleuries), parasympathomimétique.
En pratique
- A utiliser seules ou en combinaisons, de préférence en diffusion (10 à 15 minutes de diffusion / renouvelée 2 à 3 fois par jour) ou en inhalation (stick inhalateur, mouchoir, galet).
- Autres modalités : en friction sur le plexus solaire ou les poignets, en diluant la ou les huile(s) essentielle(s) sélectionnée(s), à 10 % au total dans une huile végétale.
Sylvain Caula, Dr en pharmacie et naturopathe, en collaboration avec APOTICARIUS®
Pour en savoir plus et développer vos compétences en aromathérapie scientifique et médicale :
-
Formation pluri professionnelle en classe virtuelle : https://www.apoticarius.com/formation-aromatherapie-en-ligne-e-learning-huile-essentielle-professionnels-de-la-sante-f64.php
- Formation pluri professionnelle en présentiel : https://www.apoticarius.com/stage-aromatherapie-interdisciplinaire-professionnels-de-la-sante-f1.php
- Formation sur site en EHPAD : https://www.apoticarius.com/huile-essentielle-soins-de-confort-ehpad-f60.php
Bibliographie
(1): Faucon M.Traité d’aromathérapie scientifique et médicale: les huiles essentielles. Editions Sang de la Terre. Avril 2017.
(2): López V, Nielsen B, Solas M, Ramírez MJ, Jäger AK. Exploring Pharmacological Mechanisms of Lavender (Lavandula angustifolia) Essential Oil on Central Nervous System Targets. Front Pharmacol. 2017 May 19;8:280. https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/28579958/
(3): Kang HJ, Nam ES, Lee Y, Kim M. How Strong is the Evidence for the Anxiolytic Efficacy of Lavender?: Systematic Review and Meta-analysis of Randomized Controlled Trials. Asian Nurs Res (Korean Soc Nurs Sci). 2019 Dec;13(5):295-305. https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/31743795/
(4): Johnson K, West T, Diana S, Todd J, Haynes B, Bernhardt J, Johnson R. Use of aromatherapy to promote a therapeutic nurse environment. Intensive Crit Care Nurs. 2017 Jun;40:18-25. https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/28237089/
(5): Seo KA, Kim H, Ku HY et al. The monoterpenoids citral and geraniol are moderate inhibitors of CYP2B6 hydroxylase activity. Chem Biol Interact. 2008 Aug 11;174(3):141-6.